jeudi 9 août 2018

> Le poème du jeudi (#65)




Jours perdus


Le silence tombe sur les arbres la pâle forêt
se penche jusqu’à la terre quelque part ton visage est blanc
fatigué tu penses à moi qui
n’aimais que la façon dont tes yeux se refermaient et en eux
le chagrin qui m’accompagne depuis que je suis née
les mouvements
les cascades aux couleurs de cendre
les aubes portant à travers les champs sales
leur tristesse

Une sorte d’oiseau malmené volait là-haut son aile d’hiver
tailladait des blessures gémissantes dans le ciel
et de nouveau je me tenais là devant la maison où
tu m’avais embrassée jadis

La pâle forêt se penche sur ses branches lasses
un vent sans but s’y balance les jours perdus
défilent vers moi débraillés décolorés
comme les nuages

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Agota Kristof, in Clous. Editions Zoé, 2016. Traduit du hongrois par Maria Maïlat.

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